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"L'affaire Teissier"
et le blanchiment du commerce horoscopique
par Patrice Guinard (philosophe)


Note: Ce dossier, prévu depuis un an, a été retardé pour diverses raisons. On y trouvera quelques extraits de la critique universitaire, la défense de l'intéressée, et les points de vue d'Illel Kieser, de Jacques Halbronn et de Daniel Cobbi.
 

Illel Kieser (anthropologue): Mythanalyse de l'affaire Teissier

Daniel Cobbi (astrologue): L'industrie astrologique française

Jacques Halbronn (sociologue): Elizabeth Teissier ou la tentation du compromis
 
 

Présentation

"L'affaire Teissier" est un bien grand mot pour le petit événement qui semble avoir achevé sa course en eau de boudin. La thèse de Germaine Hanselmann (dite Elizabeth Teissier), intitulée "Situation épistémologique de l'astrologie à travers l'ambivalence fascination/rejet dans les sociétés postmodernes", a été soutenue le 7 avril 2001 sous la direction de Michel Maffesoli dans le cadre du département de sociologie de l'université René Descartes (Paris V). Le jury de thèse était constitué des sociologues Serge Moscovici, président du jury, Patrick Tacussel, et Patrick Watier, ainsi que des philosophes Françoise Bonardel et Gilbert Durand, lesquels en 1993 ont validé ma propre thèse.

La thèse Teissier a fait l'objet de diverses protestations dans les médias à l'instigation de rationalistes scientistes, relayés par des sociologues. Avant et après la soutenance, un petit cercle de sceptiques et zététiques, les AFIS, font pression sur le président de l'université parisienne et sur le corps académique, afin que soit fait barrage à la thèse de la candidate. Ces tentatives d'intimidation ont donné naissance à divers articles dans la presse -- toujours zélée pour faire montre d'anti-astrologisme et généralement sourde quant à informer sur les avancées de la recherche en ce domaine --, et à la création d'un site internet, par une équipe de sociologues opposés à la réception de cette thèse.

A cette occasion, a été mise en place une pétition qui rappelle celle des signataires de 1975 (voir mon Manifeste: http://cura.free.fr/01qapa1.html) et ont été rédigés divers articles: "La non thèse de sociologie d'Elizabeth Teissier" par B. Lahire, P. Cibois, et D. Desjeux, "Une non-thèse qui cache mal une vraie thèse: un plaidoyer pro-astrologique" par une équipe d'astrophysiciens et scientistes habitués des polémiques anti-astrologiques, et les "Remarques philosophiques conclusives" par le wittgensteinien Jacques Bouveresse.

Germaine Hanselmann, mariée à André Teissier en 1960, est une personne habile. Elle a su faire preuve des compétences et des talents requis afin de présenter avec succès un travail de facture académique l'autorisant à accéder au grade de Docteur de l'université, et réussi à adapter son discours, peu ou prou, aux exigences de l'appareil académique, là où les astrologues d'écoles et d'associations, en sont encore à singer les diplômes et statuts universitaires par de petits exercices internes de valeur quasi nulle.
 

La critique sociologique

Je laisserai de côté le discours redondant de la poignée d'idéologues scientistes et leur "argumentation astronomique" qui n'a que faire dans la discussion, ni dans ce cas particulier, ni plus généralement. Cette argumentation reste inchangée depuis le XVIème siècle, et il semble que les astrologues qui y ont répondu depuis quatre siècles, ont passé leur temps en pure perte puisqu'il n'existe aucune évolution sensible de leur raisonnement (cf. mon Manifeste au chapitre 8: "L'astrophobie scientiste"). L'astrologie ne prétend d'ailleurs pas être une science, mais un savoir a-scientifique comme la psychanalyse, contrairement à ce que prétend la thésarde.

Dans leur réquisitoire récemment posté sur Internet, des représentants (en sont-ils?) de la sociologie française accusent la candidate d'avoir manqué à ses obligations de conformité aux diverses méthodes sociologiques en vigueur et "d'une totale absence de point de vue sociologique, ainsi que d'hypothèses, de méthodes et de 'données empiriques' de nature sociologique." Autrement dit ces sociologues remettent en cause la compétence d'un collègue, directeur de cette thèse, Michel Maffesoli, par des affirmations qu'il convient de questionner. Outre Maffesoli, des sociologues comme Alain Touraine et Jean Baudrillard qui comptent parmi les quelques rares phares de la sociologie française, ont fait savoir leur désaccord quant au procès intenté contre la thèse. On peut douter en revanche de la postérité des sociologues intrigants, finalement peu intéressés par l'astrologie et par ses enjeux, et se demander s'ils n'ont pas été manipulés et piégés par les idéologues de l'AFIS, association connue des astrologues pour ses propos partisans.

On trouve par exemple dans le numéro 221 (mai-juin 1996), à la page 5, de la revue AFIS Science, ces ragots odieux et calomnieux sous la "signature" d'un certain M. R.: "La fille dont il [Michel Gauquelin] s'éprit croyait dur comme fer aux horoscopes [sic!]. Il ne voulut pas la suivre sur ce terrain, et leur désaccord fut à deux doigts de rompre leurs projets matrimoniaux. Ils imaginèrent un curieux compromis. Françoise Gauquelin mettrait sous le boisseau ses horoscopes traditionnels [sic!], et elle collaborerait avec son époux pour étudier l'influence des planètes." Et le gratte-papier de spéculer avec abjection sur les causes du suicide de Michel Gauquelin! Cette feuille de chou se trouve assez aisément sur les rayonnages de nombre de bibliothèques municipales en France, alors qu'aucune d'elle, à ma connaissance, n'est abonnée à une quelconque revue astrologique sérieuse. Que les sociologues en fassent le constat et relisent mon Manifeste quant à la nature idéologique de la posture antiastrologique, et à son implantation et ses ramifications dans les services culturels étatiques -- un véritable sujet sociologique que je propose à d'éventuels futurs candidats.
 

Quelques extraits du texte des sociologues
Bernard Lahire, Philippe Cibois & Dominique Desjeux, "La non thèse de sociologie d'Elizabeth Teissier" (http://persoweb.francenet.fr/~cibois/Analyse3.htm) dont la reproduction ne nous a pas été autorisée, si ce n'est dans des conditions inacceptables.

Une lecture rigoureuse et précise de la thèse dans son entier (qui fait environ 900 pages si l'on inclut l'annexe intitulée "Quelques preuves irréfutables en faveur de l'influence planétaire", p. XII-XL) conduit à un jugement assez simple : la thèse d'E. Teissier n'est, à aucun moment ni en aucune manière, une thèse de sociologie. Il n'est pas même question d'un degré moindre de qualité (une "mauvaise" thèse de sociologie ou une thèse "moyenne"), mais d'une totale absence de point de vue sociologique, ainsi que d'hypothèses, de méthodes et de "données empiriques" de nature sociologique.
(...)
Il n'y a, dans le texte d'E. Teissier, aucune trace de problématique sociologique un tant soit peu élaborée, de données empiriques (scientifiquement construites) ou de méthodes de recherche dignes de ce nom. L'"hypothèse" floue annoncée ("à savoir cette ambivalence sociétale où prime cependant la fascination, ambivalence qui frise parfois le paradoxe et qui fait figure de schyzophrénie (sic) collective", p. 7) n'est d'ailleurs qu'une affirmation parmi d'autres qui ne débouche sur aucun dispositif de recherche en vue d'essayer de la valider (mais telle qu'elle est formulée, on a en effet du mal à savoir ce qui pourrait être validé ou invalidé).
En revanche, on a affaire, comme nous allons le voir, à de nombreux usages douteux des références sociologiques, à des propos clairement a-sociologiques et anti-rationalistes exprimés dans un style d'écriture pompeux et creux, ainsi qu'à des "données" anecdotiques et narcissiques (E. Teissier à la télévision, E. Teissier et la presse écrite, E. Teissier et ses démêlés avec les scientifiques, E. Teissier et les hommes de pouvoir, Le courrier des lecteurs d'E. Teissier...) suivis de commentaires le plus souvent polémiques (règlements de compte ou récits des règlements de compte avec telle ou telle personnalité de la télévision, tel ou tel scientifique, etc.) ou d'une série de citations d'auteurs rarement en rapport avec les propos qui les précèdent et avec ceux qui les suivent.
(...)
Si l'on entend par "données empiriques" des matériaux qui sont sélectionnés, recueillis et/ou produits en vue de l'interprétation la plus fondée possible de tel ou tel aspect du monde social, c'est-à-dire à des corpus de données dont les principes de constitution et de délimitation sont explicitement énoncés, on peut dire sans risque que la thèse d'E. Teissier ne contient strictement aucune donnée empirique. Si l'auteur avait une conception un tant soit peu empirique de la pratique de recherche en sociologie (rappelons qu'elle dit mettre en œuvre "la méthode empirique"), elle n'oserait par exemple pas écrire avec autant de légèreté et d'inconscience empirique qu'elle va suivre l'évolution de l'astrologie "à travers le temps et l'espace dans les sociétés les plus diverses, de la nuit des temps à nos jours" en annonçant explicitement qu'elle se livrera "à un rapide survol, aussi bien chronologique que géographique, diachronique que synchronique..." (p. 93). Mais pourquoi se donner la peine de mettre en place un véritable dispositif de recherche lorsque l'on pense que "la vitalité de l'astrologie aujourd'hui ne fait aucun doute" et que "pour preuve, il suffit d'ouvrir les yeux et les oreilles" (p. 792) ?
De même, comment apporter une preuve de "l'intérêt de plus en plus marqué des médias pour l'astrologie" ? E. Teissier répond : "il n'y a pas une semaine où nous ne soyons pas sollicitée à participer, ici ou là, en France ou à l'étranger, à une émission de ce genre" (p. 274). En fait, E. Teissier enchaîne de manière aléatoire les anecdotes personnelles au gré de l'association de ses souvenirs : "Dans le contexte de l'être-ensemble, une autre histoire nous revient à l'esprit, où nous étions à la fois témoin et partie" (p. 412) ; "Une autre histoire exemplaire nous revient à l'esprit." (p. 383), etc. Elle raconte ce qu'on lui a dit ou écrit et ce qu'elle a répondu. Ses commentaires, quand il y en a, se contentent de prolonger la polémique lorsqu'il y avait polémique (avec les journalistes, les animateurs de télévision, les scientifiques, etc.) et de souligner l'intérêt pour l'astrologie — malgré le consensus culturel en défaveur de l'astrologie et la ghéttoïsation de cette dernière — qu'illustrent certaines anecdotes.
L'anecdote tirée "au hasard" (signe sans doute d'objectivité à ses yeux) fait toujours preuve.
Si elle fait également le compte rendu d'échanges de courriers avec certains lecteurs, pour "preuve" de l'ambivalence fascination/rejet vis-à-vis de l'astrologie ("C- Le courrier des lecteurs et téléspectateurs, baromètres de notre société", p. 311-386), il n'est aucunement question de constituer un corpus, ni même de faire une analyse sociologique, mais de donner à lire le courrier reçu, ainsi que les réponses envoyées ("Voici ce que nous avons répondu à ce lecteur :...", p. 319 ; "Voici la réponse que nous adressâmes à cette lectrice désorientée", p. 327). On n'a pas même d'évaluation précise des différents types de courriers qu'elle reçoit. Ainsi, à propos des lettres qu'elle range dans la rubrique "Les appels à l'aide", elle écrit de manière approximative : "Il s'agit certainement, quantitativement parlant, de la masse la plus importante de lettres reçues" (p. 312) ou encore que "Parmi les appels à l'aide, les lettres émanant de prisonniers ne sont pas rares" (p. 321).
Et l'on va ainsi d'une anecdote à l'autre : E. Teissier en "face-à-face avec un astronome monolithique dans son agressivité" (p. 543), E. Teissier et Marcel Jullian, PDG d'Antenne 2 (p. 588-629) à propos de l'émission Astralement vôtre, E. Teissier et l'émission allemande Astrow-show entre 1981 et 1983 (p. 645 et suivantes), E. Teissier et l'émission Comme un lundi de Christophe Dechavanne du 8 janvier 1996 (p. 671-685), E. Teissier et l'émission Duel sur la cinq du 10 juin 1988 (p. 709-725), etc. Et à chaque fois, l'auteur émet des jugements péremptoires, polémique, formule des réponses agressives. Elle n'étudie donc pas les réactions à l'astrologie, elle la défend. Elle ne fait pas l'analyse des polémiques autour de l'astrologie, mais est dans la polémique, continuant dans cette thèse — comme sur les plateaux de télévision, sur les ondes radiophoniques ou dans la presse écrite — à batailler contre ceux qui considèrent que ce n'est pas une science.
Dans tous les cas, le narcissisme naïf est grand, bien que totalement dénié : "Bien que nous refusions dans ce travail de nous mettre en avant pour des raisons à la fois d'objectivité et d'une décence de bon aloi, on aura remarqué que nous fûmes à travers toute l'émission la seule astrologue à être prise à parti..." (p. 686). Non seulement les exemples pris par E. Teissier ne concernent qu'E. Teissier (alors même qu'elle aurait pu s'intéresser à d'autres collègues astrologues), mais les récits mettent toujours en avant la vie héroïque ou passionnante d'E. Teissier. C'est ainsi qu'elle raconte par exemple comment la rencontre de l'astrologie fut "le grand tournant de sa vie" : "Nous eûmes droit à notre nuit de Pascal — nuit boréale en réalité, car l'"illumination" dura quelque six mois, le temps d'apprendre les fondements cosmographiques et symboliques de l'art royal des astres, suffisamment pour être éblouie des "convergences" d'une part psychologiques, d'autre part événementielles avec notre caractère et notre vécu, ou ceux de notre entourage" (p. X). Ou encore, faisant le récit du contexte dans lequel elle a été contactée pour présenter l'émission allemande Astro-Show : "Lorsque, au tout début de 1981, à notre retour d'un voyage en Inde, nous trouvâmes trois messages consécutifs et quelque peu impatients de l'ARD (première chaîne télévisuelle allemande), nous fûmes plutôt surprise. Jusque-là en effet notre rayon d'action n'avait pas passé les limites du Rhin." (p. 646).
 

Les sociologues en crise semblent ignorer l'existence d'autres thèses comparables concernant l'astrologie et notamment la mienne soutenue en 1993 (voir "L'astrologie et l'épi-astrologie à l'université: Un siècle de thèses doctorales", http://cura.free.fr/01authd.html), et l'on ne sait pas trop bien si l'enjeu est pour eux le scandale de la soutenance d'une recherche universitaire sur l'astrologie, ou d'une thèse tentée par une ex-cover girl (Teissier, Plon, 2001, p.4 de couverture), reconvertie en une astrologue médiatisée. Dans ce nouveau réquisitoire contre l'astrologie, il est évident que ce n'est pas seulement l'argumentation et le raisonnement de la candidate qui sont contestés, mais d'abord leur provenance, c'est-à-dire le fait qu'ils soient formulés par la vedette d'un spectacle douteux qui aurait réussi à singer le discours du candidat formé aux méthodologies universitaires éprouvées.

La crédibilité de la sociologie leur a paru être douloureusement remise en question, d’autant plus que la sociologie souffre déjà endémiquement d’un déficit de scientificité. En effet, il n'est pas plus de vérificabilité ou de possibilité de prédire l'événementiel en sociologie qu'en astrologie, en dépit des hâbleries de l'astrologue de Télé-7-Jours. Et que devient la crédibilité de la sociologie, si le discours sociologique, ou même "ethnométhodologique" et égocentré à la manière d'un Yves Lecerf, ne consiste guère plus qu'à raconter sa petite histoire personnelle? -- discours dont se contentent, hélas!, nombre d'ethnologues en fonction et dont ne s'est pas privée la candidate.

Quel est le degré de scientificité du discours sociologique? L'aptitude à prévoir des manifestations et événements sociaux à venir n'est-elle pas tout aussi questionnable que celle affirmée par l'outrecuidance de certains astrologues? Quelles sont ces "méthodes" scientifiques dont pourrait se prévaloir le discours sociologique? Fait-on ici référence à la fabrication de quelques questionnaires dont les "résultats" sont analysés par quelque grille de décodage préconçue? Existe-t-il une réflexion réelle sur les pratiques et questionnements sociologiques? Les conclusions de ces petits exercices permettent-ils de faire voir autre chose que les opinions et comportements que la pression idéologique et médiatique a forgés chez les interrogés?

Ces déficiences sont trop claires quant il s'agit de rendre compte d'une marginalité quelconque, comme l'astrologique, jaugée et moulinée à l'aune d'une raison et d'une normalité jamais interrogées. Ainsi Pierre Bourdieu dans Les héritiers (1964), puis dans La distinction (Paris, Minuit, 1979). "Bref, chez les étudiants comme chez les professeurs, la tentation première pourrait être d'utiliser l'invocation du handicap social comme alibi ou excuse, c'est-à-dire comme raison suffisante d'abdiquer les exigences formelles du système d'enseignement. Autre forme de la même abdication, mais plus dangereuse parce qu'elle peut s'armer d'une apparence de logique et se parer des apparences du relativisme sociologique, l'illusion populiste pourrait conduire à revendiquer la promotion à l'ordre de la culture enseignée par l'Ecole des cultures parallèles portées par les classes les plus défavorisées." (Pierre Bourdieu & Jean-Claude Passeron, Les héritiers (Les étudiants et la culture), Paris, Minuit, 1964, p.110)

A-t-on seulement interrogé ces "exigences formelles du système d'enseignement"? Et quid des contenus d'enseignement?! Croit-on que ces formes sont sans incidence sur le discours lui-même? Et à "exigences formelles" égales, comment recrute-t-on les nouveaux lauréats et fonctionnaires des postes étatiques, si ce n'est par copinage, et par d'autres procédés qui n'ont plus rien à voir avec de quelconques exigences d'aucune sorte?

Pourquoi encore l'astrologie, activité marginale s'il en est, devrait être la proie perpétuelle du discours socio-idéologique, et non pas l'activité sociologique elle-même, rétribuée par le contribuable? L'astrologie est un savoir, avant d'être le symptôme imaginé par le sociologue, un savoir qui a probablement beaucoup plus d'avenir (et de passé) que le discours socio-idéologique.

A l'occasion du décès de Pierre Bourdieu (janvier 2002), l'un de nos trois sociologues anti-Teissier a imaginé un décompte sur la "valeur" de Bourdieu en fonction de la place accordée à son décès par divers quotidiens (surface consacrée au défunt proportionnellement au prix du quotidien! Cf. http://persoweb.francenet.fr/~cibois/AnalysePressePB.htm). Nietzsche calculait plus vite et plus juste quand il comptait les sociologues comme autant de "zéros additionnés".
 

Le "sens" de la thèse Teissier

Revenons sur l'affirmation centrale des sociologues patentés: "la thèse d'E. Teissier n'est, à aucun moment ni en aucune manière, une thèse de sociologie". Et admettons, finalement, qu'elle puisse receler une part de vérité. La thèse Teissier ne serait pas une thèse de sociologie, pas plus qu'une thèse d'épistémologie. Il n'est pas même question ici d'une mauvaise thèse -- on sait qu'il en existe bien d'autres de ce type au sein des départements de recherche les plus divers --, mais d'une thèse "sans nom", sans locus défini par les instances académiques. Et c'est bien la question: l'astrologie nécessite, en tant que connaissance, au même titre que la sociologie ou que la psychanalyse, un espace que la raison moderne ne lui reconnaît pas. Ainsi se pourrait-il qu'une thèse sur l'astrologie ne puisse être qu'artificiellement rattachée à des territoires de recherche ciselés par le savoir institutionnalisé. D'où l'ironie du discours de Mme Teissier, non que l'ironie soit en soit une propriété du discours astrologique -- elle en serait plutôt la constante des discours qui la combattent -- mais elle y apparaît nécessairement comme résultante du statut attribué à l'astrologie par la ratio moderne, ou postmoderne comme on voudra.

On chercherait d'ailleurs en vain une quelconque 'thèse', c'est-à-dire la mise en place d'un véritable complexe d'idées, personnelles et argumentées, dans le travail de Mme Teissier, et c'est précisément en cela que réside le paradoxe, l'ironie (face à la bêtise anti-astrologique) et finalement le sens de son étude, s'il faut lui en trouver un: l'impossibilité d'aborder le fait astrologique par le biais de la sociologie, l'impossibilité de travailler ou de penser l'astrologie à partir du moment où aucun espace de recherche ne lui est alloué.
 

Le blanchiment du commerce astrologique

Elizabeth Teissier s'est empressée de faire publier chez Plon, en novembre 2001, L'homme d'aujourd'hui et les astres (Fascination et rejet), un ouvrage qui reprend sa thèse sans changement notable.

Le texte débute mal avec, placée en exergue, la fameuse citation attribuée à Einstein, drainée depuis quelques dizaines années par divers manuels d'astrologie sans indication de source. Le physicien allemand aurait "soit pratiqué, soit vénéré la science des astres" (p.13)! L'ouvrage est un pot-pourri de facture journalistique, avec citations multiples (philosophes, sociologues, penseurs new age, physiciens dissidents...) sans que ne se développe à aucun moment une quelconque orientation originale de recherche. Comme l'ont souligné à juste titre les sociologues: cette thèse est un simple discours apologétique de l'astrologie.

E. T. s'est gardée de citer les principales sources de ses incursions. Dans une annexe intitulée "Deux horoscopes Qoumrâniens: identification des personnages" (p.583-587), elle reprend et plagie les thèses et références de l'astrologue britannique John Addey (cf. "Astrology in the Dead Sea Scrolls", The Astrological Journal, 8.1, 1965).

L'ex-candidate ne discute pas les diverses analyses sociologiques produites depuis une vingtaine d'années, notamment dans les pays anglo-saxons. La recherche sociologique sur le sujet est totalement ignorée: par exemple Francis Fullam (Contemporary belief in astrology, University of Chicago Press, 1984), ou certains articles de la revue Personality and Social Psychology Bulletin. Même la thèse française de Daniel Gros, soutenue en 1984 en sociologie et sous la direction d'Edgar Morin (La Profession d'astrologue. Etude sociologique d'une profession marginale, statut, vocation, pratique) est ignorée. E. T. en est restée à la critique d'Adorno, certes pionnière, non sans m'emprunter certains arguments, jusqu'au ton polémique que je préconise face au caractère idéologique de son argumentation. Elle ignore le sociologue Bruno Latour dont les analyses auraient pu servir ses propos.

Les philosophes qu'elle cite en revanche à l'envi, plus que les sociologues eux-mêmes, ne servent que de decorum à son discours, et aucune problématique n'est jamais engagée à partir de concepts piochés au petit bonheur. Une autre catégorie d'auteurs fréquemment cités est celle de la "nouvelle physique", pour la plupart sans source ni référence, tels Bell, Burr, Chew, Linssen... (p.137) aux côtés des inévitables David Bohm, Fritjof Capra, Stéphane Lupasco, Bernard d'Espagnat et Rupert Sheldrake, mentionnés dans nombre de traités d'astrologie en mal de justification "scientifique". On peut se demander si l'ex-candidate a acquis une quelconque connaissance en ce domaine, quand, de son propre aveu, elle ne maîtrise pas même les bases de l'astronomie ("d'autant que l'explication [de la précession des équinoxes], impliquant des notions astronomiques compliquées, n'est guère facile ni à donner ni à comprendre", p.77), et que de grossières bévues sont commises sur les astronomes et astrologues du passé, parmi les plus connus: ainsi Hipparque qui aurait vécu au IIème siècle après JC (corrigé dans l'ouvrage suite à une critique scientiste publiée sur Internet), ou Manilius qui aurait vécu "après Ptolémée" (p.77 de l'ouvrage, erreur non corrigée, montrant à la fois l'ignorance de l'ex-candidate, comme celle de son critique!).

Le "survol sociohistorique" (présenté dans l'ouvrage aux pages 93 et suivantes) n'est d'ailleurs qu'un pillage des deux ou trois traités généralistes traduits en français, dont celui de l'allemand Wilhelm Knappich, prisé par tous les débutants en ce domaine, et par ailleurs truffé de coquilles dans sa version française (cf. ma "Bibliographie de l'histoire de l'astrologie", http://cura.free.fr/02qomha.html). A la page 130, on trouve cette perle: l'astrologue Fomalhaut, alias Charles Nicoullaud (1854-1925), aurait donné son nom à l'étoile du même nom! Il s'agit d'un vocable d'origine arabe. Et à la page 521, on apprend que Nostradamus aurait annoncé sa propre mort, la veille de l'événement, à Catherine de Médicis!

Les problèmes intrinsèques aux différentes écoles et techniques astrologiques, autrement dit les véritables questions astrologiques, sont évacués d'emblée, et la présentation "bateau" (chapitre 3) du "système astrologique" ne saurait recueillir l'assentiment que d'un public ignorant. De cette manière, E. T. se débarrasse de toute question épistémologique, en dépit de l'habillage prétentieux du titre donné à son texte. Ainsi sont posées et supposées une astrologie qui formerait système sans questionnement et une tradition dont l'historicité est ignorée. En ce sens, cette thèse n'est pas même une thèse d'astrologie.

Nombre d'idées exprimées reprennent des conclusions qui figurent dans mes propre travaux (1984 et 1993). L'ex-candidate, qui pourtant a profité amplement de ma recherche soutenue à la Sorbonne en 1993, et même réussi à récupérer une partie des membres de mon jury, ignore explicitement mes travaux tout en reprenant à son compte de nombreuses idées, sans les développements analytiques qui les justifiaient. On retrouve ainsi divers éléments de mon Manifeste (présents dans ma thèse de 1993 et développés dans la revue L'Astrologue en 1996-97-99), pillés, maquillés et dilués dans un discours banalisé. Quelques exemples:
 
 
L'astrologie présentée comme un système: "un ensemble d'éléments interdépendants formant un tout [...] justifiée par l'existence de cycles planétaires [...] Qui dit système dit structure." (Teissier, p.27-28). A comparer avec Le Manifeste 2/4, "Le Ternaire de la Connaissance", http://cura.free.fr/01qqa2.html)
"Dilthey qui semble confondre compréhension et description" (Teissier, p.36) "Wilhelm Dilthey (...) ne distingue pas le "psychique" du "socio-historique", et se contente d'opposer l'explication de la Nature à la compréhension [...] Or il existe bien trois niveaux : l'explication du monde physique, l'interprétation du monde culturel, et la compréhension du monde psychique." (in Le Manifeste 2/4, Ibid.)
"l'argument de la précession (...) tarte à la crème des attaques antiastrologiques" (Teissier, p.77) "L'argument de la précession (...) avant de devenir la tarte à la crème de la sophistique scientiste" (in Le Manifeste 3/4, "L'astrophobie scientiste", http://cura.free.fr/01qapa1.html)

L'absence de probité intellectuelle a conduit la thésarde à mentionner la soutenance, en 1993, d'une thèse de médecine, travail "innovateur" (p.520), afin de mieux masquer l'apparition, la même année, de ma propre recherche. Elle a même poussé le cynisme jusqu'à reprendre mon idée que cette date de 1993, marquée par la conjonction Uranus-Neptune, annonçait un renouveau astrologique, conformément à la demi-boutade que j'ai lancée dans mon Manifeste (cf. Le Manifeste 4/4, http://cura.free.fr/01qapa2.html, à hauteur de la note 27).

Peu d'astrologues sont cités, et visiblement pas ceux qui ont adopté une certaine exigence de recherche, par exemple Nicola avec qui elle a collaboré dans la revue Astrologique, à ses débuts dans les années 70. D'autres astrologues et penseurs ont été pillés, à l'instar de John Addey précédemment cité, ou Vlaicu Ionescu (1976, 1983, 1987): "ce fait [la connaissance de Neptune par Nostradamus] que je découvris moi-même récemment [sic! Je souligne] dans un éblouissement incrédule..." (p.605) La seule présence dans un quatrain du nom mythologique de Neptune ne suffit d'ailleurs pas à valider cette idée (sur cette question, cf. "Nostradamus connaissait-il les planètes trans-saturniennes?", http://cura.free.fr/05nostra.html).

Il y a toujours un abîme entre les penseurs originaux et leurs piètres plagiaires. La culture, et a fortiori la pensée philosophique, ne s'achètent pas à coups de pub et de communiqués de presse. Et cette question des sources et références tronquées désigne à coup sûr les charlatans, pratique d'ailleurs commune dans les milieux astrologiques, et dont l'éradication est une condition sine qua non de l'évolution future de cette discipline.

Le marivaudage journalistique, notamment dans la section concernant les "exploits" médiatiques de la vedette, et à partir de sources multiples, prend parfois une mesure telle que l'on se demande si toute une équipe n'a pas été engagée dans la collecte et l'élaboration des fiches, à l'instar de ces prédictions et horoscopes fabriqués en série.

Le discours Teissier est au service d'une astrologie commune, consensuelle, autoproclamée "populaire", rivée sur le négoce et accroissant l'infantilisation de son public et de sa clientèle -- une astrologie de bazar. Et la thèse universitaire trouve dès lors sa fonction de faire-valoir, permettant le blanchiment du commerce astrologique. Le titre en poche, et l'esprit retourné vers les affaires habituelles, l'astrologue des médias a repris post-thesis ses activités et continue à marchander ses horoscopes et prédictions, et par suite à ternir l'image de l'astrologie auprès de l'intelligentsia et à maintenir le grand public dans la servitude, au niveau zéro de la compréhension.
 

Le recours à M. Bouveresse

Quelques extraits de "Remarques philosophiques conclusives" par Jacques Bouveresse (texte complet à l'adresse http://persoweb.francenet.fr/~cibois/Analyse3.htm).

La thèse soutenue par Madame Elizabeth Teissier le 7 avril de cette année sous le titre "Situation épistémologique de l'astrologie à travers l'ambivalence fascination/rejet dans les sociétés postmodernes" soulève en premier lieu la question de savoir ce que vient faire exactement le mot "épistémologique" dans le titre. Même si elle cite un nombre considérable de scientifiques et d'épistémologues éminents (qu'elle interprète généralement à contresens, comme elle le fait également, de façon à peu près aussi systématique, avec les sociologues qu'elle utilise), elle ne comporte aucune analyse épistémologique réelle. La candidate était d'ailleurs, de toute évidence, bien incapable d'en fournir une seule. Et il ne s'agit pas non plus d'un travail de sociologie des sciences (ou, si l'on préfère, des pseudo-sciences), une discipline dont la candidate ne maîtrise pas davantage les exigences, les principes et la méthode.
(...)
La thèse procède la plupart du temps par une accumulation, destinée à créer une impression d'érudition et de sérieux irréprochables - la candidate connaît manifestement les règles du jeu universitaire -, de citations de personnalités illustres de toutes les époques, utilisées sur le mode de l'argument d'autorité. Madame Teissier a trouvé, en particulier, un nombre considérable de déclarations de grands scientifiques qui disent des choses qu'elle interprète comme des arguments en faveur de la reconnaissance de l'astrologie comme discipline scientifique. Mais elle devrait, dans ce cas, se demander pourquoi les représentants agréés de ce qu'elle appelle le "nouvel esprit scientifique" n'ont pas encore signé un appel solennel en faveur d'une égalité de traitement entre l'astrologie et l'astronomie (il doit s'agir ici non plus d'intolérance, mais plutôt d'inconséquence pure et simple). On ne peut pas ne pas avoir ici une pensée émue pour Bachelard, un des auteurs dont les textes sont le plus
grossièrement mésinterprétés ou détournés de leur sens et qui, quand il a parlé d'un "nouvel esprit scientifique", ne pensait malheureusement pas, comme Madame Teissier, au Colloque de Cordoue. Le comble de l'ironie est atteint quand elle cite un ouvrage comme La Formation de l'esprit scientifique, dont elle a été manifestement incapable d'apprendre quoi que ce soit, en croyant que ce genre de livre apporte de l'eau à son moulin. Tout est bon, à commencer par les déclarations des plus grands scientifiques eux-mêmes, quand il s'agit de balayer devant la porte de la science; mais rien de ce qui, dans leur discours, pourrait constituer, implicitement ou explicitement, une menace pour la respectabilité scientifique de l'astrologie n'est jamais évoqué.
(...)
De façon générale, la thèse use et abuse de l'argument Tu quoque!, sans remarquer que soutenir que la science procède finalement de façon aussi irrationnelle que l'astrologie revient à concéder que l'astrologie procède effectivement de façon irrationnelle et à scier la branche sur laquelle on souhaite la faire asseoir, puisque ce que l'auteur voudrait nous faire croire est qu'elle est en fin de compte aussi rationnelle et même, tout compte fait, beaucoup plus rationnelle qu'une science qui a dégénéré en une simple religion, sclérosée, dogmatique et sectaire.
(...)
Convaincre un éditeur commercial tenté par la perspective d'un bon "coup" à jouer et prêt à exploiter le succès de scandale qui accompagnait déjà la soutenance devrait, en tout cas, être encore plus facile pour Madame Teissier que cela ne l'a été de convaincre ses juges universitaires. Les innombrables thésards qui rédigent et soutiennent des travaux en tous points remarquables, pour lesquels ils ne parviennent pas à trouver ensuite un éditeur, apprécieront sûrement le fait de voir paraître sous le nom de "thèse de doctorat" un ouvrage comme celui dont il s'agit.
 

Jacques Bouveresse statue à son tour, cette fois, sur la nature "non-épistémologique" de la thèse de Mme Teissier -- une évidence au vu de sa "connaissance" très fragmentaire de l'histoire de l'astrologie. L'auteur du "Philosophe chez les autophages" (1984) se réfère à Bachelard. Malheureusement pour lui, il se trouve que le dit Bachelard a consacré une étude historique sur les travaux d'un astrologue du XVIIème siècle, et il résulte, d'après les récentes analyses de ce texte (cf. Jacques Halbronn, "Misères de l'Histoire de l'Astrologie (Gaston Bachelard et les 'Véritables Connoissances des Influences Célestes et sublunaires' de R. Decartes)", http://cura.free.fr/xv/14halbr6.html), que Bachelard ignorait l'existence des traités contemporains de celui faussement attribué à Descartes, et qu'il se méprenait même sur le sens des concepts les plus élémentaires du discours astrologique. Autrement dit il n'avait pas la connaissance requise et nécessaire pour entreprendre une telle étude spécialisée, et ne maîtrisait pas les données de base de l'astrologie. L'intérêt d'un tel exemple, malheureusement choisi par M. Bouveresse lui-même, réside dans le fait qu'une épistémologie est impossible sans la connaissance du passé d'une discipline, ni sans celle de son état actuel. Et c'est précisément ce que nécessite toute épistémologie: la connaissance du passé comme de l'état présent d'une discipline.

Si la thèse Teissier n'est pas non plus une thèse d'épistémologie, et qu'elle ne peut l'être, c'est que l'histoire de l'astrologie, qu'elle soit babylonienne, grecque ou indienne, reste ignorée des départements de recherche, que les contribuables des pays industrialisés ne sont jamais sollicités pour que des fonds soient octroyés à la constitution d'une bibliothèque de recherche (et d'ailleurs leur avis n'est pas requis: voir sur ces questions, l'ouvrage de l'épistémologue Feyerabend, Science in a free society, et mon Manifeste), qu'une connaissance, même sommaire, de l'astrologie contemporaire est totalement ignorée par les spécialistes universitaires d'autres disciplines, comme probablement par la majorité des signataires qui se sont opposés à la reconnaissance de la thèse de l'astrologue "populaire" Teissier. Dès lors que les bibliothèques publiques refusent de collecter, et même de cataloguer, les quelques rares revues spécialisées en ce domaine, les critiques extérieures de l'astrologie sont vouées à la stérilité. (voir l'exemple de l'excellente revue canadienne Phenomena, The News Journal of Cosmic Influence Research, (2.3-4, 1978, p.9), que la Library of Congress refuse de cataloguer à la fin des années 70).

Comment, dans ces conditions, une épistémologie de l'astrologie serait-elle possible? J'ai montré dans mes travaux que les carcans de recherche alloués à l'astrologie par la pensée moderne sont inadaptés à son développement, que les diverses méthodes en vigueur sont totalement inappropriées, que c'est même par la coercition de ces méthodes externes, que je qualifie en ce cas d'idéologiques, que l'astrologie a pu être progressivement éradiquée du champ du savoir, par le passé, comme elle continue de l'être aujourd'hui.

Le paradoxe de la critique externe, c'est qu'elle manque infailliblement son objet. Seuls les astrologues compétents auraient la capacité d'estimer la valeur d'une recherche dans leur discipline. Si le travail de Mme Teissier est inacceptable comme l'affirme Bouveresse à satiété, c'est d'abord parce qu'il ne satisfait pas aux exigences de la recherche en astrologie. Qu'il ait été placé "sous le couvert" de la sociologie importe peu. Et finalement, s'il relève vraiment du genre apologétique, c'est un bien mauvais service rendu à l'astrologie que de confondre, en son nom, la Teissier des prédictions TV, et maintenant des horoscopes Internet, avec la recherche authentique qui germe un peu partout dans le monde depuis une quinzaine d'années, aux yeux d'une intelligentsia déjà mal informée en ce domaine.
 

Note P.G. (Mars 2003):

Une version abrégée de mon texte est parue dans le numéro 28 de "la Lettre des Astrologues" (revue interne adressée aux membres de la FDAF, regroupement fédératif d'astrologues français). Mme Teissier a exigé par recommandé un droit de réponse auprès des responsables de cette association.

Le lecteur du CURA, s'il a la chance de trouver cette revue confidentielle, pourra suivre dans le numéro de Janvier 2003, avec amusement, les justifications pitoyables, et dégoût, les gesticulations écoeurantes de l'intéressée. Sa réponse se borne à de petits coups de semonce revanchards, ad hominem : toute une série de piques accumulées qui portent à faux et appellent irrésistiblement à la bonne humeur, quand elles ne parviennent pas à faire pleurer. Ainsi: "si j'avais une mentalité de roquet jaloux, j'en profiterais..." glisse la répondante qui prétend ignorer l'existence de ma thèse, mais croit être de force à porter un jugement sur son style! Et elle lit "L'Astrologue", revue dans laquelle mon Manifeste est paru à partir du début de l'année 1996 et dont elle "s'inspire" abondamment pour ses prédictions annuelles. E. T. est encore dans la singerie avec le titre même qu'elle donne à son papier. On pourra mesurer les terribles ravages que peut parfois provoquer l'astrologie sur des cerveaux à moitié détraqués.

Au final, elle me reproche de ne pas avoir la couverture médiatique des commerçants de l'horoscopie (et la quasi totalité de son discours tourne autour de ce seul refrain), ne répond à aucune des critiques que j'ai développées, ne se sent pas concernée par son ignorance des travaux sociologiques antérieurs à sa soutenance, tardive, et enfin trouve naturel pour un(e) candidat(e) à une thèse universitaire de méconnaître les travaux de ses prédécesseurs (les miens, ceux de J. Halbronn, mon "acolyte" (sic), "champion du compromis et des combines", mais auteur, en 1995, d'un D.E.S.S. de sociologie qu'elle ignore, comme la plupart des autres thèses de sociologie), ce qui ne l'empêche pas de clamer ici et là qu'elle aurait réhabilité l'astrologie à l'université !

Certains lecteurs m'ont reproché l'existence de cette critique: c'est à eux que je m'adresse. Je pense que ce texte illustre parfaitement la situation de l'astrologie à l'université, et ainsi la problématique idéologique que j'ai développée dans mon Manifeste. Il fallait répondre aux sceptiques et autres zététiciens qui ont saisi l'aubaine de la thèse Teissier pour avancer leurs oripeaux dans la basse-cour des aboyeurs et jacasseurs (voir la récente réaction des Broch et Charpak, chez Odile Jacob -- l'éditeur français d'Alan Sokal) et faire entendre une voix qui ne réitère pas le cauchemar de la seule astrologie incompétente et commerçante, trop facilement fustigée par les ricaneurs de service.

Enfin, que la répondante n'ait pas saisi le message et moins encore le destinataire final de ce texte n'étonnera nullement le lecteur attentif qui m'a aimablement suivi jusqu'en pourtour de cette page pour lui et moi quelque peu dégradante ou au mieux pesante, et qui hésite : qu'il sache que je compatis, et qu'il me pardonne si je la maintiens à faire encore moyen feu.


Référence de la page :
Patrice Guinard: "L'affaire Teissier"
et le blanchiment du commerce horoscopique
http://cura.free.fr/19afftei.html
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