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Note sur Léopold de Saussure, pionnier de l'histoire de l'astrologie chinoise
par Patrice Guinard

 

De notoriété éclipsée par celle de Ferdinand, son frère célébrissime, Léopold de Saussure mériterait d'être considéré comme le pionnier de l'astronomie et de l'astrologie chinoise. Né dans une famille d'érudits genevois le 30 mai 1866, marié lieutenant de vaisseau le 20 mai 1895 avec Germaine Duval ( Aymon Galiffe, Notices généalogiques sur les familles genevoises, Tome IV (2e éd.), Genève, A. Jullien, 1908, p.169 ), il est décédé à Genève le 30 juillet 1925. Son père Henri (1829-1905) était naturaliste et entomologiste ; son frère aîné Ferdinand (1857-1913) fut le célèbre linguiste. Le Cours de linguistique générale (1915), dont la lecture était obligatoire dans les années 70 dans les départements littéraires de l'université française, a malheureusement éclipsé la sémiotique de Peirce, plus subtile, sans doute parce que la conception dualiste du signe chez Saussure s'adaptait mieux à la grossièreté pragmatique de la pensée moderne.

Les principaux textes de Léopold sont parus dans le journal T'oung pao entre 1907 et 1922, mais aussi dans les Archives des sciences physiques et naturelles à Genève, et dans le Journal Asiatique. Les textes de T'oung pao ont été réunis à Paris chez Maisonneuve en 1930 sous le titre Les origines de l'Astronomie chinoise (cf. DIAL). Un compte-rendu sommaire de l'ouvrage de 1930 est paru dans T'oung pao (vol 24, Leiden, Brill, 1926, p.447). L'auteur du compte-rendu reproche à l'éditeur parisien de ne pas indiquer les paginations originelles de la revue, ni même d'indiquer les années originelles de parution, alors même que les renvois de Saussure dans son texte sont laissés tels quels, reprenant la pagination T'oung pao. J'ajoute que l'erreur des deux chapitres "G" (que j'ai renommés G1 et G2) n'est pas davantage corrigée dans l'édition Maisonneuve.

La plupart de ces textes sont disponibles en bibliothèque numérique, à l'exception du chapitre G1 dont on trouvera une copie ci-jointe : Saussure, éd. 1930, chapitre G1 (reproduisant T'oung pao, 1913, vol. 14, pp.387-426).

Saussure, réexamine les hypothèses du père jésuite Antoine Gaubil (1689-1759) et de Jean-Baptiste Biot (1774-1862), et défend, après eux et contre les spécialistes de son temps, la haute antiquité de l'astronomie et de l'astrologie chinoises, comparable à la babylonienne. Le texte du Yao-tien notamment suppose une division équatoriale de l'espace céleste en quadrants selon quatre étoiles-repères qui marqueraient le milieu des saisons dès 2350 BC.

Saussure expose la division du ciel et de la terre en cinq régions dont une centrale, l'établissement d'une astronomie équatoriale et horaire très ancienne, fondée sur le cycle lunaire, et non plus sur les levers et couchers héliaques des astres comme en Babylonie, l'origine et les transformations successives du fameux cycle des douze animaux, sa liaison avec le cycle annuaire jupitérien et la signification qui aurait été donnée à ses phases animales symboliques vers 380-400 AD (1930, p.431), et surtout l'organisation métaphysique de la première cosmogonie chinoise sous l'instigation d'experts astronomes-astrologues, finalement comme en Mésopotamie. "Le thème principal de l'astrologie chinoise n'est pas l'horoscope ; c'est l'idée que les occupations , rurales et politiques, afférentes aux diverses saisons sont des rites gouvernés par le firmament." (1930, p.124).

Un chapitre intéressant concerne l'antiquité des 28 astérismes chinois (sieou) et hindous (nakshatras), leur filiation, et leur répartition en douze groupes marquant les 12 ou 13 lunaisons annuelles.

Saussure, qui comme tous ses collègues de l'époque, fait montre des préjugés antiastrologiques communs, ne peut s'empêcher, au cours de ses explications, de mentionner les experts-astrologues chinois qui seraient les instigateurs des transformations successives des modèles exposés. Saussure reconnaît la haute valeur métaphysique de l'ancienne cosmogonie chinoise, mais ne parvient pas à en attribuer la paternité à ceux qui précisément en furent les auteurs, comme si métaphysique et astrologie étaient des antonymes. Or précisément : ses textes sont l'exacte réfutation de ses a priori partagés, ce qui pourrait expliquer les réticences de ses collègues et leur diffusion relativement confidentielle.
 
 

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Patrice Guinard: Note sur Léopold de Saussure, pionnier de l'histoire de l'astrologie chinoise
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